2022 et l’Apocalypse

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Qui aime être corrigé ou repris ? Qui aime être contredit ?

Généralement, ce n’est pas très agréable lorsqu’une personne nous fait remarquer que l’on a fait une erreur, que l’on s’est trompé ou que l’on a mal fait. Quoique, si cela est fait avec amour et bienveillance, c’est moins difficile à entendre.

J’ai entendu dire que nous vivons dans une époque où l’on a particulièrement du mal à gérer la frustration. On a du mal à être remis en cause.

Cela a certainement toujours été le cas, mais ce serait encore plus prononcé au xxie siècle. Je ne suis pas sociologue ni psychologue, mais mon avis, c’est que nous vivons dans un monde où nous avons tellement de choses à portée de main et rapidement accessibles, que par rapport aux générations précédentes, nous exerçons moins notre patience et notre maitrise de soi.

Nous vivons aussi à l’air de Facebook. J’ai vu un reportage sur l’utilisation des réseaux sociaux chez les jeunes, mais cela ne concerne pas que les jeunes.

Lorsqu’un adolescent n’a pas trop le moral, il sait ce qu’il peut poster sur les réseaux sociaux pour recevoir immédiatement une avalanche de compliments et d’approbation. Et ça va mieux, et l’estime de soi remonte.

Et les gens qui répondent plutôt avec des pouces en bas plutôt que des pouces en haut, il suffit juste de les enlever de sa liste de contacts.

Les gens ont tendance à faire de même dans leurs relations et c’est en partie cela qui explique que sur beaucoup de sujets, on ne trouve plus de position nuancée, mais des positions extrêmes. Il n’y a plus de vrai dialogue si l’on n’arrive plus à discuter sereinement avec des gens qui ne sont pas d’accord avec nous.

Comme je l’ai dit, nous vivons dans une société où l’on a particulièrement du mal à accepter d’être remis en question.

Aujourd’hui nous vivons le premier culte de l’année 2022. On dit parfois que lorsqu’une nouvelle année commence, c’est l’occasion de prendre de bonnes résolutions, l’occasion d’un nouveau départ.

Mais comment prendre de bonnes résolutions, comment faire mieux que l’année passée, si nous n’avons pas des retours sur ce qui peut être amélioré ? Autrement dit : comment s’améliorer si quelqu’un ne nous a pas dit ce qui n’allait pas ?

Dans la Bible, Jésus fait un bilan qui est révélé dans le livre de l’Apocalypse, nous allons en lire un passage dans quelques instants. Jésus s’adresse en particulier à 7 Églises, elles représentent l’ensemble des Églises existantes à l’époque, et même les Églises d’aujourd’hui.

L’apôtre Jean reçoit des visions qu’il met par écrit pour les communautés.

Le but de Jésus est d’encourager les chrétiens dans un contexte de persécution.  Cela prend notamment la forme d’une sorte de bilan, où le Christ félicite les communautés pour leurs points forts et où il adresse aussi des reproches concernant leurs points faibles.

Que ce soit les compliments ou les reproches, tout est révélé pour le bien de l’Église en question, afin d’aider les chrétiens à savoir où ils en sont et comment mieux poursuivre la mission du Christ.

Alors qu’ils sont persécutés, inquiétés et mis à mort, Jésus rappelle que ce qui importe, c’est de répondre favorablement et fidèlement à l’appel de Dieu.

Je vous invite à lire maintenant la lettre qui est adressée à l’Église de Pergame. Il y a quelques semaines, avant la période de Noël, nous avions commencé une série de prédication sur l’Apocalypse. Je propose de la poursuivre et nous sommes au chapitre 2, versets 12 à 17.

12 »écris à l’ange de l’Église de Pergame: ‘Voici ce que dit celui qui tient l’épée aiguë à deux tranchants:
13 Je connais [tes oeuvres et] l’endroit où tu es établi: là se trouve le trône de Satan. Tu es fermement attaché à mon nom et tu n’as pas renié la foi en moi, même durant les jours où Antipas, mon témoin fidèle, a été mis à mort chez vous, là où Satan est établi.
14 Mais j’ai certaines choses contre toi: tu as là des gens attachés à la doctrine de Balaam, qui enseignait à Balak à tendre un piège aux Israélites pour qu’ils mangent des viandes sacrifiées aux idoles et se livrent à l’immoralité sexuelle.
15 Ainsi, toi aussi, tu as des gens attachés de la même manière à la doctrine des nicolaïtes. ///
16 Repens-toi donc, sinon je viendrai bientôt à toi et je les combattrai avec l’épée de ma bouche.
17 Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux Églises: Au vainqueur je donnerai [à manger] de la manne cachée, et je lui donnerai un caillou blanc. Sur ce caillou est écrit un nom nouveau que personne ne connaît, si ce n’est celui qui le reçoit.’

La première chose que l’on peut relever, c’est la manière dont Jésus se présente : « il est celui qui tient l’épée aigüe à deux tranchants ».

[1. Celui qui tient l’épée aigüe à deux tranchants]

Pour comprendre cette manière assez étrange de se présenter, il faut présenter un peu la ville de Pergame.

Cette ville comptait de nombreux temples d’idoles. On y adorait en particulier 4 grandes divinités : Zeus Soter (le Dieu sauveur), dont l’autel a fait partie de la liste des merveilles du monde ; Athena , la déesse de la raison ; Dionysos, la dieu de la vigne et du vin ; et enfin Esculape, dieu de la médecine.

Plusieurs auteurs disent que Pergame était « la Lourdes de l’antiquité », car les gens y venaient pour demander au dieu Esculape de les guérir de toutes sortes de maladies.

Avant la ville d’Éphèse, Pergame a été la capitale de la province de l’Asie Mineure, c’était une ville importante. Elle a été le siège du premier temple voué au culte de l’empereur.

À l’époque il y avait certainement une rivalité entre Éphèse, Smyrne et Pergame. Ces trois villes se disputaient la première place, à savoir : quelle ville était le centre du culte de l’empereur ?

C’est ce qui explique le zèle particulier des citoyens pour afficher leur loyauté envers l’empereur. C’est pour cette raison que les autorités ne toléraient pas que les habitants de Pergame refusent de pratiquer le culte impérial.

Et c’est probablement pour toutes ces raisons que Jésus décrit cette ville comme étant là où siège le trône de Satan. L’idolâtrie est présente de manière intense, avec tous les temples d’idoles, les dieux et le culte impérial.

Notre texte fait mention d’un certain Antipas, qui a été mis à mort. On pense que  ce chrétien a été mis à mort parce qu’il a refusé d’adorer l’empereur.

Le proconsul de la province d’Asie détenait un pouvoir qui n’était pas donné à tout le monde, il s’agit du droit de vie et de mort, cela lui permettait de décider de la mise à mort des citoyens rebelles à l’autorité romaine.

Le symbole de cette haute autorité était justement une épée aiguisée à double tranchant.

Donc lorsque Jésus se présente comme celui qui tient l’épée à double tranchant, il dit aux chrétiens que c’est lui l’autorité suprême, et non pas le proconsul qui menace de mettre à mort les chrétiens qui ne rendent pas un culte à l’empereur.

Ici, le Christ rappelle qu’il détient le pouvoir de vie et de mort plus redoutable que le proconsul romain. Son autorité est plus grande que toute autorité humaine.

Ce rappel est aussi valable pour nous. Que craignons-nous aujourd’hui ? Quelles que soient nos craintes ou nos inquiétudes, Dieu est au-dessus de cela, il est plus fort que tout, il tient notre destinée entre ses mains. C’est une invitation à nous confier en lui.

 Au verset 13, Jésus félicite les chrétiens de Pergame pour leur fidélité.

[2. Tu es fermement attaché à mon nom]

Ce compliment est très fort.

Comme nous l’avons dit, la persécution est présente. Tout le monde autour d’eux adore l’empereur et les autres dieux. Un certain Antipas a été mis à mort, certainement car il refusait de pratiquer le culte impérial.

Malgré les pressions et les menaces, ces chrétiens ont tenu bon, ils sont restés fidèles.

Antipas est qualifié de « témoin fidèle » au verset 13, un attribut qui est réservé à Jésus lui-même dans le Nouveau Testament. Cet homme a suivi les traces du Christ, il reçoit donc le même titre de témoin fidèle.

Ce compliment adressé à l’Église de Pergame nous interpelle.

Ces chrétiens devaient être au clair sur le Dieu qu’ils servaient. S’ils choisissaient Jésus, ils ne pouvaient pas choisir l’empereur ou une autre idole. Il n’y a qu’un seul Dieu.

Et nous, avons-nous fait le choix d’adorer un seul Dieu ?

Qu’est-ce qui occupe le plus nos pensées ?

Nous demandons-nous comment faire plaisir à Dieu ? Comment le servir jour après jour, dans chaque situation de la vie quotidienne ?

Après ce compliment, Jésus met le doigt sur un sujet de reproche.

[3. Tu as des gens attachés à la doctrine des nicolaïtes]

Ce reproche de Jésus semble sévère. Il vient de leur faire un beau compliment, et tout de suite après, il les reprend assez durement.

Comment expliquer ce revirement de ton ?

En fait, ce n’est pas vraiment un revirement. Puisque ces chrétiens sont fidèles, Jésus les encourage à être fidèles jusqu’au bout, en leur montrant ce qu’il faut corriger. Ce reproche est une marque de bienveillance, c’est pour les rendre plus saints.

Chez les chrétiens de Pergame, une chose n’allait pas. Ils laissaient des gens vivre selon la doctrine des nicolaïtes tout comme les Israélites d’autrefois se sont attachés à la doctrine de Balaam.

Qui sont les nicolaïtes et qui est Balaam ?

Commençons par Balaam. Les évènements se passent à l’époque de Moïse, autour de 1300 av. J.-C.. Le peuple d’Israël errait dans le désert après sa sortie d’Égypte. Au cours de leur voyage, les Israélites ont planté leurs tentes près du peuple de Moab. Le roi de ce peuple s’appelait Balak.

Ce dernier s’était rendu compte que le peuple d’Israël était béni de Dieu et qu’il était puissant, alors il a pris peur. Il a voulu maudire ce peuple en faisant appel à un magicien du nom de Balaam.

Le problème pour ces deux hommes, c’est que Dieu est intervenu à plusieurs reprises pour empêcher Balaam de maudire Israël. Dieu l’a même utilisé pour bénir son peuple et non le maudire.

Alors Balaam a mis en place un stratagème pour corrompre Israël. Il a conseillé à Balak d’envoyer des femmes pour séduire les Israélites. Ces femmes avaient pour mission d’inciter les hommes à avoir des relations physiques avec elles et à adorer d’autres idoles.

De cette manière les Israélites se sont détournés de Dieu et Dieu les a sévèrement punis. Nous pouvons lire ce récit dans le livre des Nombres.

Dans la lettre à Pergame, Jésus mentionne les nicolaïtes. C’était un groupe religieux qui agissait comme Balaam. Ils incitaient les chrétiens à adorer d’autres idoles et à avoir des pratiques sexuelles immorales.

À première vue on pourrait se dire qu’il y a un contraste surprenant.

D’une part, Jésus félicite ces chrétiens de tenir ferme malgré la persécution. D’autre part, il leur reproche d’avoir dans la communauté des gens attachés aux pratiques nicolaïtes.

Cela signifie que des membres de l’Église se rendaient aux cultes d’idoles et mangeaient à cette occasion de la viande sacrifiée aux idoles, ce qui était signe d’un engagement spirituel envers les idoles. De plus, comme le dit Jésus au verset 14 : ils se livrent à l’immoralité sexuelle.

Comment ont-ils pu en arriver là dans l’Église ? Une Église qui semble si dévouée au Seigneur ? Je pense qu’il peut y avoir deux raisons principales.

Tout d’abord, tout le monde autour d’eux pratiquait ces choses. À force de voir tous leurs contemporains adopter une certaine attitude vis-à-vis des idoles et vis-à-vis de la sexualité, ils se sont dit que c’était normal. Si tout le monde le fait, c’est normal.

Ensuite, les nicolaïtes présentaient leurs pratiques comme étant compatibles avec la foi chrétienne, en plus personne dans l’Église ne leur dit rien.

On peut se poser cette question pour nous aujourd’hui : quelles sont les idoles de notre époque ? Quelles sont les pratiques courantes que tout le monde trouve normales, mais qui déplaisent à Dieu ?

Il y aurait beaucoup de choses à dire, mais je pense que l’une des idoles de notre époque est la liberté, ou plutôt une fausse conception de la liberté.

Cette pseudo-liberté qui dit : « J’ai le droit de faire tout ce que mes désirs me dictent. Je peux faire tout ce que je veux tant que je ne fais de mal à personne. Je ne veux aucune limitation à mes envies. »

En réalité, la vraie liberté, c’est le pouvoir de faire un choix éclairé, le pouvoir de dire non à la dictature de nos désirs lorsque ces désirs sont mauvais. La vraie liberté, c’est de trouver notre joie dans notre vocation, celle de disciples de Jésus, celle d’enfants de Dieu.

Parmi les idoles de ce monde, la pseudo-liberté en fait partie. Dès lors que l’on donne un avis  qui va à l’encontre de cette liberté-là, on passe pour des intolérants, des gens fermés.

C’est intéressant, car des sociologues appellent cela le nouvel exclusivisme. On est dans une société où l’on tolère tout, on parle beaucoup d’inclusion, on veut inclure tous les points de vue, on est libre, tout le monde a raison, tout le monde peut faire ce qu’il veut. Mais dès que l’on a un avis différent de cette majorité, on est montré du doigt, on est exclu.

C’est donc étrange de parler d’inclusion et de tolérance, lorsque l’on exclue et lorsque l’on ne tolère pas ceux qui ne sont pas d’accord.

Je ne suis pas en train de dire qu’il faut être intolérant. En fait la Bible ne parle pas de tolérance ou d’intolérance, elle parle d’amour. L’amour est plus fort que la tolérance, car on est appelé à aimer tout le monde, même les gens avec qui l’on n’est pas d’accord.

Revenons à Pergame. Jésus demande quelque chose de difficile aux responsables de cette Église. Il leur reproche d’avoir des gens dans l’Église qui sont attachés aux pratiques des nicolaïtes. Il ne leur reproche pas à eux de s’adonner à ces pratiques, mais il leur reproche de les laisser faire dans l’Église.

Jésus leur demande de s’occuper de cette situation. Ils devraient aller voir ces personnes dans l’Église pour leur dire que leur mode de vie basée sur une pseudo-liberté ne plait pas à Dieu. Bien sûr ils doivent le leur dire avec amour.

C’est intéressant, car de nos jours, la société veut plutôt écarter les gens qui ont un discours trop ferme, et laisser la place aux gens qui ont des discours très ouvert, très permissif.

Jésus demande exactement l’inverse à Pergame. Il leur reproche de ne pas avoir un discours plus ferme par rapport à la doctrine des nicolaïtes et de laisser faire ces gens qui prônent une pseudo-liberté.

La conclusion de la lettre à Pergame parle d’épée, de la manne et d’une pierre blanche.

[4. L’épée, la manne et la pierre blanche]

Jésus combattra avec l’épée ceux qui lui auront été infidèles. Cette image n’a aucune connotation guerrière. Dans la Bible, l’épée symbolise souvent la Parole de Dieu. C’est sur la base de sa Parole que le monde sera jugé.

Et aux vainqueurs, c’est-à-dire aux fidèles, il leur donnera de la manne cachée et une pierre blanche.

La manne était le pain que Dieu envoyait chaque jour à son peuple lorsqu’il errait dans le désert. La pierre blanche était utilisée comme un laissez-passer à l’époque de Jean.

Par exemple, lorsqu’on se rendait à un tournoi sportif, la pierre blanche servait de badge d’entrée au stade.

Dans un tribunal, lorsque le juge déclarait quelqu’un innocent, il lui remettait symboliquement une pierre blanche, c’était le passe vers la liberté.

Sur la pierre blanche, Jésus précise qu’il y aura un nouveau nom inscrit dessus. Certains pensent qu’il nous attribuera à chacun un nouveau nom. D’autres pensent que c’est le nouveau nom de Jésus. Les deux interprétations sont possibles.

Quoi qu’il en soit, les témoins fidèles de Jésus, comme Antipas, seront les vainqueurs. Ceux-là hériteront de la vie éternelle.

En cette nouvelle année 2022, voici comment je résumerai l’exhortation de ce texte : pour prendre de bonnes résolutions, acceptons d’être remis en question par la Parole de Dieu et soyons des témoins fidèles jusqu’au bout.

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