Grâce reçue et grâce accordée (Actes 7, Ephésiens 4, Genèse)

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À l’approche de Pâques, je vous propose de nous arrêter un moment sur le thème de la grâce. Thème qui revient souvent dans nos cultes, mais que nous n’arrivons pas toujours à saisir pleinement tellement cette notion est renversante, contre nature. La notion de grâce va à l’encontre de notre manière humaine de penser. Si quelqu’un pense  avoir tout compris sur la grâce, alors il n’a probablement rien compris.

La semaine dernière, nous avions lu la lettre de Paul aux Éphésiens, le chapitre 4. À la fin de ce chapitre, l’apôtre Paul encourage les chrétiens à faire preuve de grâce les uns envers les autres, car pour servir Dieu ensemble, nous avons besoin d’avoir des relations authentiques et bienveillantes.

Voici ce qu’il dit au verset 29 : Qu’aucune parole malsaine ne sorte de votre bouche, mais seulement de bonnes paroles qui, en fonction des besoins, servent à l’édification et transmettent une grâce à ceux qui les entendent.

Pour méditer sur la grâce selon Dieu, je vais vous parler de  trois personnes.

Trois immigrés qui ont eu une enfance mouvementée. Trois victimes d’injustice. Ils ont été rejetés, souvent dès leur enfance. Ils ont souffert d’exclusion. Ils ont dû fuir de force, ou par contrainte, pour ne pas mourir.

En résumé, ce sont trois personnes  qui ont été abîmées par les circonstances de la vie.

Souvent, les personnes qui ont eu une vie difficile gardent des séquelles, elles développent des automatismes de défense, des ressentis, de l’amertume, elles gardent des traces de leurs souffrances. Elles ont été victimes dans le passé et se voient plus facilement comme des victimes de manière générale.

Mais les trois personnes dont nous allons parler, malgré les injustices qu’elles ont vécues, ont été libérées et restaurées, au point de servir et d’aimer ceux qui les ont exclus et maltraités.

Je ne vais pas garder plus longtemps le suspens, qui sont ces trois personnes ? Il s’agit de : Joseph, Moïse et Jésus.

Quels sont les points communs entre ces trois hommes ? Il y en a beaucoup, et c’est l’évangéliste Étienne, dans le livre des Actes, qui va nous en parler.

Étienne est diacre dans la toute première Église de Jérusalem, il distribue la nourriture aux veuves, et peut-être à d’autres personnes dans le besoin.

Cet homme est également évangéliste. Il annonce l’Évangile de Jésus-Christ et Dieu fait même des miracles à travers lui.

La prédication d’Étienne ne plaît pas aux autorités juives, alors ils l’arrêtent et l’emmènent devant le tribunal juif pour l’interroger, en vue de le condamner.

Cependant, ses accusateurs n’arrivent pas à trouver un motif valable pour le faire punir, car Dieu lui donnait de la sagesse et l’Esprit inspirait ses réponses.

Alors ses adversaires trouvent des faux témoins pour dire du mal de lui, on l’accuse de blasphémer contre le temple et contre la loi. Actes 6.14, voici ce que disent les faux témoins : « nous l’avons entendu dire que Jésus, ce Nazaréen, détruira ce lieu et changera les coutumes que Moïse nous a transmises.»

Le grand prêtre, qui est en quelque sorte le juge, lui demande alors si ces accusations sont exactes. C’est là qu’il parle de nos trois personnages.

Pour sa défense, Étienne raconte pratiquement toute l’histoire du peuple d’Israël et il s’arrête particulièrement sur l’histoire de Joseph et de Moïse, puis il termine par Jésus.

[1. Joseph]

Voici ce qu’il dit sur Joseph, toujours dans le livre des Actes, chapitre 7, versets 9-14.

9 Les patriarches, jaloux de Joseph, l’ont vendu pour qu’il soit emmené en Égypte, mais Dieu était avec lui 10 et l’a délivré de toutes ses détresses. Il lui a donné la sagesse et la grâce devant le pharaon, le roi d’Égypte, qui l’a établi gouverneur de l’Égypte et de toute sa maison.
11 Il est alors survenu une famine dans toute l’Égypte et en Canaan. La détresse était grande et nos ancêtres ne trouvaient pas de quoi manger.///
12 Jacob a appris qu’il y avait du blé en Égypte et il y a envoyé nos ancêtres une première fois. 13 La deuxième fois, Joseph s’est fait reconnaître par ses frères et le pharaon a ainsi appris quelle était son origine. 14 Puis Joseph a envoyé chercher son père Jacob et toute sa famille, composée de 75 personnes.

Joseph est un descendant d’Abraham, Isaac et Jacob. Il était le chouchou de son père Jacob et à cause de cela (entre autres) ses frères ne le supportaient pas. Un jour, loin de la surveillance du père, les frères complotent pour le faire mourir, mais au dernier moment, le plan change, et au lieu de le faire mourir, ils le vendent comme esclave.

Joseph arrive en Égypte, et au fil des années, il gravit les échelons malgré les épreuves. Accusé injustement et emprisonné un temps, il finit par devenir gouverneur du pays grâce à la sagesse que Dieu lui accorde.

Il est chargé par le pharaon en personne de gérer une situation de crise, une famine extrême qui touche toute cette région de la terre.

C’est à cette époque qu’il va revoir sa famille. Voici comment Étienne résume la situation :

12 Jacob a appris qu’il y avait du blé en Égypte et il y a envoyé nos ancêtres une première fois. 13 La deuxième fois, Joseph s’est fait reconnaître par ses frères et le pharaon a ainsi appris quelle était son origine. 14 Puis Joseph a envoyé chercher son père Jacob et toute sa famille, composée de 75 personnes.

Comment les retrouvailles se sont-elles passées ?

Imaginez Joseph, gouverneur d’Égypte, qui reçoit ses frères, ceux qui ont comploté pour le faire mourir, ceux qui l’on vendu comme esclave.

La première fois qu’ils sont venus acheter du blé, Joseph n’a pas dévoilé son identité, il les a cuisinés un peu pour en savoir un peu plus sur sa famille.

La deuxième fois, l’émotion était trop forte et il a dévoilé son identité.

Mettons-nous un instant à la place de Joseph.

En Genèse 37, on sait que Joseph avait 17 ans lorsqu’il a été vendu comme esclave.

Alors qu’il rejoignait ses frères dans les pâturages, ces derniers l’ont attaqué violemment, l’ont emprisonné et ensuite vendu. Du jour au lendemain, il s’est retrouvé arraché à sa famille et à son pays, devenant esclave dans une terre étrangère, parmi des gens qui lui étaient totalement inconnus.

22 ans après, il retrouve ses agresseurs, ceux qui lui ont volé sa jeunesse, ceux qui ont fait de lui un orphelin, un esclave.

Ce jour-là, Joseph était en position de force. Il avait la possibilité de se venger. Il aurait pu les écraser sous le poids de la culpabilité avec toute sa haine. Il aurait pu déverser sur eux toute son amertume et sa colère. Ses frères n’auraient pu rien faire d’autre que de se courber devant lui, jusqu’à plus bas que terre, car ils étaient bien coupables et Joseph avait le pouvoir de vie ou de mort sur eux.

Au lieu de cela, quelles ont été les paroles de Joseph ?

Elles sont rapportées en Genèse 45, versets 3 à 7 :

3 Joseph dit à ses frères: «Je suis Joseph! Mon père est-il encore en vie?» Mais ses frères furent incapables de lui répondre, tant ils étaient troublés de se retrouver devant lui.
4 Joseph dit à ses frères: «Approchez-vous de moi» et ils s’approchèrent. Il dit: «Je suis Joseph, votre frère, celui que vous avez vendu à destination de l’Égypte.///
5 Maintenant, ne vous tourmentez pas et ne soyez pas fâchés contre vous-mêmes de m’avoir vendu pour que je sois conduit ici, car c’est pour vous sauver la vie que Dieu m’a envoyé ici avant vous.
6 Voilà 2 ans que la famine dure dans le pays, et pendant 5 ans encore il n’y aura ni labourage ni moisson. 7 Dieu m’a envoyé ici avant vous pour vous permettre de subsister dans le pays et pour vous faire vivre en vous accordant une grande délivrance.

Et nous apprenons par la suite que Joseph va leur procurer les meilleures terres d’Égypte pour y habiter et pour élever leur bétail.

Ce qui est frappant dans ce passage, c’est le pardon et la grâce que Joseph accorde. Avant même qu’ils demandent pardon, Joseph leur donne cette parole de grâce : « ne vous tourmentez pas et ne soyez pas fâchés contre vous-mêmes de m’avoir vendu pour que je sois conduit ici, car c’est pour vous sauver la vie que Dieu m’a envoyé ici avant vous ».

Cette attitude de Joseph donne un aperçu de la grâce de Dieu face à notre culpabilité de pécheurs. En plus de nous pardonner gratuitement, il nous comble de ses bénédictions, alors même que nous l’avons offensé par nos fautes.

Il faut tout de même préciser deux choses importantes à propos de cette grâce.

Tout d’abord, si Joseph a pu accorder son pardon et sa grâce à ses frères, c’est parce qu’il a compris le plan de Dieu. Il avait une proximité avec Dieu, qui lui a permis de continuer de vivre sans amertume. Ce n’est pas Joseph tout seul qui pardonne et qui fait grâce. C’est Joseph, transformé, guéri et guidé par Dieu.

Ensuite, il est important de souligner que ses frères se sont repentis de leurs fautes pendant leur première venue. Joseph les a entendus avouer et regretter leur faute, mais ils ne savaient pas que Joseph comprenait, car ils parlaient en Hébreux et ne savaient pas que le gouverneur était leur frère.

Genèse 42 verset 21 : Ils se dirent alors l’un à l’autre: «Oui, nous avons été coupables envers notre frère. Nous avons bien vu sa détresse quand il nous demandait grâce, et nous ne l’avons pas écouté. »

Enfin, cette manière de faire grâce ne peut pas être transposée à toutes les situations. Si par exemple quelqu’un est victime d’abus, Dieu peut le guérir, il peut lui enlever son amertume, lui permettre d’avoir une parole de grâce qui pardonne.

Cependant, en tant que victime d’abus, il est également important de parler, de chercher un soutien et de recourir à la justice. Cela fait partie du processus de guérison, de libération, de recherche de justice et de protection. Il s’agit de se protéger soi-même et de protéger d’autres victimes potentielles.

La vie de Joseph donne avant tout un aperçu de la grandeur de la grâce accordée par Dieu.

Intéressons-nous maintenant à Moïse.

Après avoir parlé de Joseph dans sa plaidoirie, Étienne mentionne également Moïse.

[2. Moïse]

Lisons ce qu’Étienne raconte à son propos, dans Actes 7, versets 20 à 35 :

20 A cette époque est né Moïse, qui était beau aux yeux de Dieu. Il a été nourri trois mois chez son père 21 et, quand il a été abandonné, la fille du pharaon l’a adopté et l’a élevé comme son fils.
22 Moïse a été formé avec toute la sagesse des Égyptiens; il était puissant en paroles et en actes.
23 »Il était âgé de 40 ans lorsqu’il a eu à cœur de rendre visite à ses frères, les Israélites.
24 Il en a vu un qu’on maltraitait, a pris sa défense et, pour venger l’homme malmené, a frappé l’Égyptien. 25 Ses frères comprendraient que Dieu leur accordait la délivrance par son intermédiaire, pensait-il, mais ils ne l’ont pas compris.///
26 Le jour suivant, il est venu au milieu d’eux alors que certains se battaient et il a essayé de ramener la paix en leur disant: ‘Vous êtes frères! Pourquoi vous faites-vous du mal l’un à l’autre?’
27 Mais celui qui maltraitait son prochain l’a repoussé en disant: Qui t’a établi chef et juge sur nous?
28 Veux-tu me tuer comme tu as tué l’Égyptien hier? 29 A cette parole, Moïse a pris la fuite et est allé habiter dans le pays de Madian, où il a eu deux fils.///
30 »C’est 40 ans plus tard qu’un ange du Seigneur lui est apparu dans le désert du mont Sinaï, dans la flamme d’un buisson en feu.
31 Voyant cela, Moïse a été étonné de cette apparition; comme il s’approchait pour regarder, la voix du Seigneur s’est fait entendre:
32 Je suis le Dieu de tes ancêtres, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. Moïse, tout tremblant, n’osait pas regarder.///
33 Le Seigneur lui a dit: Retire tes sandales, car l’endroit où tu te tiens est une terre sainte.
34 J’ai vu la souffrance de mon peuple qui est en Égypte, j’ai entendu ses gémissements et je suis descendu pour le délivrer. Maintenant, vas-y, je t’enverrai en Égypte. 35 »Ce Moïse qu’ils avaient renié en disant: Qui t’a établi chef et juge? c’est lui que Dieu a envoyé comme chef et libérateur avec l’aide de l’ange qui lui était apparu dans le buisson.

Lorsqu’il a essayé de faire justice soi-même en faveur de son peuple, on a demandé à Moïse: « qui t’a établi chef et juge » ?

Plus tard, Dieu l’a établi chef et juge.

Tout comme Joseph, Moïse a été au service de ceux qui l’ont rejeté. Il a également été séparé de sa famille dans sa jeunesse. Il a été adopté par la fille du pharaon, il est ainsi devenu prince d’Égypte.

Comme Joseph, Moïse a été bienveillant envers les siens. Lorsque Dieu s’est mis en colère, à juste titre, contre son peuple, Moïse a intercédé en leur faveur, en mettant sa vie en jeu.

Il a été le libérateur de son peuple, car Dieu agissait à travers lui.

La délivrance de l’esclavage était une pure grâce. Dieu a d’abord délivré son peuple, et seulement ensuite, il leur a donné les commandements et les lois.

La libération n’était pas conditionnée au respect de la loi puisqu’il n’y avait pas encore la loi.

La grâce vient en premier. Dieu nous rend libres pour faire sa volonté.

Parlons maintenant de Jésus, la dernière personne mentionnée dans la défense d’Étienne.

[3. Jésus]

À vrai dire, Jésus n’est pas nommé, mais c’est bien de lui dont il parle dans les versets 52 et 53. Étienne s’adresse ainsi au tribunal juif :

52 Lequel des prophètes vos ancêtres n’ont-ils pas persécuté? Ils ont tué ceux qui annonçaient d’avance la venue du Juste, et c’est lui que vous avez fait maintenant arrêter et dont vous êtes devenus les meurtriers, 53 vous qui avez reçu la loi par l’intermédiaire des anges et qui ne l’avez pas gardée!»

Étienne parle de Jésus en l’appelant « le Juste ». Il met l’accent sur la justice de Jésus, sur son innocence, car il a été condamné injustement. Il a été déclaré coupable alors qu’il était innocent.

Tout comme Joseph et Moïse, Jésus a aussi dû se réfugier en Égypte pour échapper au roi Hérode, qui cherchait à le tuer de peur que le messie ne prenne sa place de roi.

Comme Joseph et Moïse, Jésus a été rejeté, mais il est devenu le libérateur et le sauveur de son peuple.

Dans l’Évangile selon Jean, nous lisons que la lumière est venue dans le monde, et le monde ne l’a pas reconnue. Le messie est venu chez les siens, et les siens ne l’ont pas accueilli.

Et plus loin, en Jean 3.16, nous lisons que Dieu a tant aimé le monde, ce même monde qui rejette le messie, Dieu l’a tant aimé qu’il y a envoyé son fils, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas, mais ait la vie éternelle.

C’est la grâce de Dieu.

[Conclusion]

Pour conclure, revenons à Étienne. Pourquoi parle-t-il de Joseph, Moïse et Jésus ? Parce qu’ils ont étés rejetés à tort par leurs ancêtres israélites. Étienne leur montre qu’ils ne devraient pas rejeter le Christ.

Il répond aussi à leurs accusations de vouloir changer la loi et de détruire le temple. Jésus est bien venu remplacer le temple, car il est le temple vivant. Jésus est bien venu non pas pour abolir, mais pour accomplir la loi, pour lui donner tout son sens.

Et surtout, Jésus est venu apporter la grâce qui libère en réponse au problème de la loi qui condamne.

La grâce de Dieu est offerte à tous, y compris ceux qui l’ont rejeté, ceux qui l’ont offensé. C’est le message de Pâques, c’est le message de la Bible.

Nous pouvons recevoir cette grâce avec l’aide de Dieu, c’est lui qui nous pousse à la repentance, c’est lui qui nous transforme. Avec lui, nous pouvons être libérés des conséquences d’une enfance difficile ou d’une vie éprouvante.

Cette grâce dont nous bénéficions, nous sommes appelés à la vivre et à la partager, notamment dans nos rapports les uns avec les autres, en particulier dans la famille de Dieu.

La grâce de Dieu fait disparaître les amertumes, les ressentis, les médisances, les paroles accusatrices ou culpabilisantes. Elle laisse place à des paroles qui servent à l’édification et transmettent une grâce à ceux qui les entendent.

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