Pauvres mais riches (Apocalypse 2.8-11)

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Lorsque j’étais au collège, celui qui ne portait pas des chaussures Nike était un ringard. Je ne sais pas comment c’est aujourd’hui, mais il me semble que l’apparence et la place des marques a encore de l’importance chez les jeunes et pas seulement chez les jeunes.

Nous vivons dans une société qui est dure envers ceux qui sont différents, ceux qui sont pauvres, ceux qui n’ont pas des vêtements ou une voiture de marque. Parfois il suffit juste d’avoir un petit accent ou une couleur de cheveux particulière, et les autres peuvent se moquer de cette personne.

Malheureusement, les personnes un peu différentes ont plus de risque d’être victimes de discrimination, et donc de rester mises à l’écart de la société.

Il ne faut pas croire que ce phénomène est récent, c’était déjà ainsi il y a plusieurs milliers d’années. Les chrétiens de la ville de Smyrne étaient victimes de ce genre de comportement.

Peut-être que vous avez aussi déjà été victimes de mise à l’écart à cause de votre foi ou à cause d’une autre raison.

À l’inverse, sans être victime, on peut parfois contribuer à ce genre de phénomène sans s’en rendre compte. Lorsque l’on accorde un peu trop d’importance à l’apparence, à la mode, au prestige.

Le texte que nous allons lire ce matin se trouve dans le livre de l’Apocalypse et il aborde ce thème.

Mais avant de lire le passage concerné, voici un bref rappel de ce que nous avons vu les dernières fois.

Apocalypse signifie « révélation ». Il s’agit des révélations que Jésus-Christ communique à l’apôtre Jean, sur ce qui va bientôt arriver. Donc ce qui est décrit a déjà commencé à arriver au temps de l’apôtre, et cela se répète encore aujourd’hui. Mais ces événements ne sont pas appelés à se répéter indéfiniment, car une fin est prévue.

L’apocalypse décrit comment cette fin arrive. Pour ce faire, beaucoup de symboles sont utilisées et ce sont principalement des symboles empruntés aux prophètes de l’Ancien Testament.

Par ailleurs, l’apôtre Jean vit dans un contexte de persécution des chrétiens. Il se trouve d’ailleurs sur l’île de Patmos où il a été exilé à cause de sa foi. Cette île fait partie aujourd’hui des îles grecques.

Jésus se révèle à Jean d’une manière glorieuse et victorieuse, afin de montrer qu’il reste le tout-puissant, malgré les grandes difficultés que les chrétiens subissent.

À partir du chapitre 2, Jésus demande à Jean d’écrire des messages à 7 Églises en particulier. Ces Églises représentent l’ensemble des Églises de Jésus-Christ. Les messages leur étaient destinés en particulier, avec le contexte qui est le leur, mais il me semble que toutes les Églises de tout lieu et de tout temps peuvent se reconnaître dans l’une ou l’autre situation évoquée.

Le livre de l’Apocalypse a été écrit dans le but d’être envoyé intégralement aux 7 Églises, mais aussi aux autres Églises. On sait que les communautés avaient pour pratique de copier les écrits reçus des apôtres et de les envoyer ensuite à d’autres Églises.

Je vous propose de lire maintenant le message que le Christ adresse à l’Église de Smyrne, dans le livre de l’Apocalypse, au chapitre 2, les versets 8 à 11.

8 Écris à l’ange de l’Eglise de Smyrne: ‘Voici ce que dit le premier et le dernier, celui qui était mort et qui est revenu à la vie:
9 Je connais [tes oeuvres,] ta détresse et ta pauvreté – et pourtant tu es riche – ainsi que les calomnies de ceux qui se disent juifs et ne le sont pas, mais qui sont une synagogue de Satan.
10 Ne redoute pas ce que tu vas souffrir. Voici, le diable va jeter quelques-uns d’entre vous en prison afin que vous soyez mis à l’épreuve, et vous aurez dix jours de détresse. Sois fidèle jusqu’à la mort et je te donnerai la couronne de vie.
11 Que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux Eglises: Le vainqueur n’aura pas à souffrir de la seconde mort.’

Jésus demande à Jean d’écrire à l’ange de l’Église de Smyrne. Dans le chapitre 1, il est question des 7 anges des 7 Églises. Ces anges sont peut-être des êtres célestes associés aux  Églises, ils auraient pour mission de veiller à ce que le message leur soit transmis et de les aider à obéir à Dieu.

Ou alors, ces anges désigneraient les responsables des Églises, étant donné que les messages sont adressés directement aux Églises. Là-dessus je n’ai pas une grande certitude, mais ce qui est sûr, c’est que le message est pour l’Église.

Au verset 8, Jésus se présente comme le premier et le dernier, celui qui était mort et qui est revenu à la vie.

Cette expression de premier et de dernier fait référence à la manière dont Dieu lui-même se présente, notamment à travers le prophète Ésaïe. Par exemple :

Ésaïe 41.4b : « c’est moi, l’Éternel, qui suis le premier, et je serai encore le même avec les générations à venir. »

44.6 : « Voici ce que dit l’Éternel, le roi d’Israël et celui qui le rachète, l’Éternel, le maître de l’univers: Je suis le premier et le dernier. En dehors de moi, il n’y a pas de Dieu. »

Dans l’apocalypse, Jésus reprend exactement les paroles de Dieu pour parler de lui, il se présente lui-même comme étant Dieu, il affirme sa divinité.

Cette expression présente Jésus comme étant à l’origine de toutes choses, il est le premier, il a été acteur de la création. Il est aussi le dernier, cela signifie qu’il sera toujours là, il est éternel et il ne change pas.

Regardons maintenant ce que le Christ dit à l’Église qui est à Smyrne au verset 9 :

9 Je connais [tes oeuvres,] ta détresse et ta pauvreté – et pourtant tu es riche – ainsi que les calomnies de ceux qui se disent juifs et ne le sont pas, mais qui sont une synagogue de Satan.

Dans les messages adressés aux 7 Églises, Jésus précise qu’il connaît parfaitement la situation de chacun.

Dans le cas de Smyrne, Jésus connaît leur souffrance, leur détresse et leur pauvreté. Ils sont pauvres, mais ils sont riches aux yeux de Dieu.

[1. Pauvres mais riches]

Ces chrétiens sont calomniés notamment par ceux qui se disent juifs, mais qui ne le sont pas.

Il faut savoir que Smyrne est une ville qui se trouve dans la Turquie actuelle, aujourd’hui elle s’appelle Izmir. À l’époque de Jean, cette cité était prestigieuse à plusieurs égards.

Smyrne avait pour réputation d’être une jolie ville, certainement la plus jolie ville de la province romaine de l’Asie Mineure. Les habitants accordaient une importance particulière à leur image, leur réputation, leur esthétique.

C’était aussi une ville riche, une ville qui avait les moyens de montrer qu’elle était prestigieuse.

Cette ville était fière d’appartenir à l’Empire romain. Selon les historiens, Smyrne avait même déjà des liens privilégiés avec Rome avant même de faire partie de l’Empire. Grâce à cette collaboration étroite avec Rome, elle avait des privilèges et le soutien des dirigeants politiques.

Les chrétiens de cette ville devaient faire face à deux groupes religieux. Tout d’abord : les juifs, qui sont opposés à la foi chrétienne.

Les juifs de l’Empire romain avaient des privilèges, ils bénéficiaient notamment d’une tolérance particulière qui leur permettait de ne pas adorer l’empereur en échange d’une taxe. Ils avaient le droit de pratiquer leur religion sans être inquiétés. Les autorités juridiques devaient même s’abstenir de les convoquer durant les jours de sabbat et durant leurs fêtes.

Ensuite, il y avait une population non juive, les païens,  qui soutenaient le culte à l’empereur romain. Ces citoyens devaient considérer les chrétiens comme des marginaux, des gens qui refusent le culte à l’empereur.

À cause de cela, les chrétiens devaient certainement être mis à l’écart de la vie économique et sociale. Ce qui expliquerait leur pauvreté alors que Smyrne est une ville riche.

Jésus leur dit qu’il connaît leur situation de pauvreté et de persécutés. Il connaît les calomnies de ceux qui se disent juifs et ne le sont pas, mais qui sont une synagogue de Satan.

Cette parole contre les juifs peut nous paraître assez violente. Jésus les décrit comme étant des faux juifs, il va jusqu’à dire qu’ils forment une synagogue de Satan.

En fait, parmi les chrétiens de Smyrne, il y avait des juifs qui avaient mis leur foi en Jésus. Comme ils étaient d’origine juive, ils bénéficiaient des privilèges accordés aux juifs. Mais les autres juifs, ceux qui rejettent Jésus, les accusaient de ne pas être juifs, car ils rendent un culte à Jésus-Christ et ils ne se soumettent plus aux rituels de loi.

Ici le Christ leur retourne l’accusation. En réalité, les juifs qui ont mis leur foi en Jésus sont les vrais juifs, ce sont eux qui forment le peuple de Dieu. Jésus est le messie annoncé par les prophètes de la Torah. C’est Jésus qui a accompli la loi et qui met fin aux lois rituelles.

Les juifs qui n’ont pas mis leur foi en Christ ont refusé le messie que leurs propres prophètes annonçaient. De plus, leur attachement aux privilèges romains, leurs calomnies et leurs persécutions vis-à-vis de l’Église font d’eux des ouvriers de Satan, dans le sens où ils accomplissent ce que Satan désire.

Je précise que Jésus ne parle pas de tous les juifs, mais il parle bien de ceux qui persécutent l’Église.

Dans ce contexte de persécution de la part des juifs et de mise à l’écart de la part des païens, Jésus sait que les chrétiens de Smyrne tiennent bon.

Ils sont pauvres, mais aux yeux de Dieu, ils sont riches.

On imagine cette Église de Smyrne avec peu de moyens. C’est probablement une communauté fréquentée par une population pauvre. Contrairement à Éphèse, Jésus ne met pas en avant la richesse de leur programme d’Église ou leur dynamisme, mais juste leur persévérance dans l’épreuve, et Dieu en est très satisfait.

Contrairement à Éphèse, Dieu ne fait aucun reproche à Smyrne. Il leur demande simplement de continuer dans cette voie, d’autant plus que la persécution va se poursuivre…

À ce propos, regardons le verset 10 :

10 Ne redoute pas ce que tu vas souffrir. Voici, le diable va jeter quelques-uns d’entre vous en prison afin que vous soyez mis à l’épreuve, et vous aurez dix jours de détresse. Sois fidèle jusqu’à la mort et je te donnerai la couronne de vie.

Jésus annonce aux habitants de Smyrne qu’ils auront 10 jours de détresse.

[2. 10 jours de détresse]

En général, lorsque l’on veut encourager une personne qui souffre, on essaie de l’aider et de lui montrer aussi le positif. On dit même parfois quelque chose qui n’est peut-être pas si approprié que cela, on dit : « ne t’inquiète pas, ça va aller mieux ».

Peut-être que vous ne le faites pas, mais dans la maladresse, il peut arriver que l’on entende ce genre de parole censé consoler ou encourager une personne.

Ici, Jésus ne dit pas que tout va aller mieux, en tout cas pas tout de suite. Au contraire, il leur annonce des détresses à venir. Mais avec cette annonce, il les encourage à ne pas redouter l’épreuve.

C’est d’ailleurs bien d’une épreuve dont il s’agit, car le diable va en jeter quelques-uns en prison. Notons que ce n’est pas Dieu qui est l’auteur de l’épreuve, mais c’est le diable.

Contrairement à la pratique de notre époque, la prison n’était pas une condamnation en elle-même. Dans l’Empire Romain on mettait une personne en prison en attendant son jugement.

À l’issue du jugement, si la personne était condamnée, il y avait soit une amende à payer, soit un exil, soit une mise à mort.

Il y aura donc des chrétiens mis en prison en attendant d’être jugés. Il y aura aussi 10 jours de détresse.

Ces 10 jours de détresses vont éprouver leur confiance et leur fidélité. Leur foi en sortira encore plus grande et plus glorieuse.

Est-ce que ce sont 10 jours symboliques ou littéralement 10 jours ?

On ne sait pas. Mais si l’on cherche une symbolique, on peut se demander dans quelles circonstances le nombre 10 est mentionné dans la Bible ?

On se rend compte que ce nombre est relativement peu utilisé, mais il nous rappelle quand même quelques passages bibliques, comme les 10 commandements ou les 10 plaies d’Égypte.

Si l’on fait un rapprochement avec les 10 plaies d’Égypte, le point commun c’est qu’il y a une période difficile.

L’annonce de ce temps difficile est une mauvaise nouvelle, cela dit, 10 jours c’est une période limitée, que ce soit 10 jours symbolique ou littéral, il y aura une fin à cette détresse. Dieu ne permet qu’une action limitée au diable.

Plus généralement, les détresses que nous vivons sont limitées dans le temps par Dieu. Parfois, on a l’impression que notre épreuve dure longtemps, mais comparée à l’éternité ce n’est rien.

Plusieurs fois, Jésus fait référence à l’espérance à venir. Après la souffrance, il y a la victoire. Jésus dit qu’il donnera la couronne de vie au vainqueur.

Jésus met l’accent sur cette promesse, il veut que l’on fasse partie des vainqueurs. Alors il insiste : « que celui qui a des oreilles écoute ce que l’Esprit dit aux Églises. »

Avoir des oreilles, c’est être disposé à écouter. Que celui qui est disposé écoute avec attention ce que l’Esprit dit aux Églises.

On peut noter qu’au début du message, on nous dit que c’est Jésus qui parle, il se présente comme Dieu se présente, il est le premier et le dernier. Et à la fin, on apprend que c’est l’Esprit qui dit cela à l’Église.

En fait, Jésus parle par son Esprit, tout comme il l’avait promis à ses disciples. Nous avons dans ce texte une mention du Dieu trinitaire. Jésus est Dieu, et lorsque le Saint-Esprit parle, c’est exactement comme si c’était Jésus qui parlait.

La dernière chose que nous pouvons relever dans les paroles de Jésus, c’est qu’il a lui-même souffert. Dès le début de la lettre à l’Église de Smyrne, il se présente comme celui qui est mort et qui est revenu à la vie.

[3. Jésus est mort et ressuscité]

Jésus est mort en souffrant physiquement, mais aussi moralement. Il a été trahi par son propre  peuple. Il est venu apporter le pardon de Dieu au monde et le monde l’a rejeté. Le monde l’a méprisé.

On lui a mis une couronne d’épines sur la tête pour se moquer de lui, et on l’a cloué sur une croix comme les criminels. Mais il n’est pas resté mort, il est revenu à la vie. C’est le seul homme à être revenu de la mort définitivement. Il est le seul à avoir vaincu la mort. C’est pour cela qu’il peut nous offrir la vie éternelle.

Je trouve cela très intéressant que Jésus se présente à cette Église comme celui qui est mort et ressuscité. Il leur fait comprendre qu’il est lui aussi passé par l’épreuve avant la victoire.

Les chrétiens de Smyrne marchent vraiment sur les pas du Christ et c’est aussi peut-être pour cela que nous avons l’impression qu’il les affectionne particulièrement.

Ils sont pauvres alors que tous les autres citoyens autour d’eux sont riches.

Leur Église est simple, alors que toute la ville mise sur l’esthétique et le prestige.

Leur foi est solide malgré la persécution.

Si l’on devait comparer toutes les Églises de l’Asie mineure, Smyrne était certainement la moins belle esthétiquement, la plus pauvre, ils n’avaient pas du matériel dernier cri.

En gros, c’étaient les plus petits, ils étaient les derniers. Mais aux yeux de Dieu, le plus petit c’est justement le plus grand. Dans le royaume de Dieu, les premiers seront les derniers et les derniers seront les premiers.

Les chrétiens de Smyrne doivent tenir bon, car c’est une glorieuse victoire qui les attend.

Verset 11 : Le vainqueur n’aura pas à souffrir de la seconde mort.

La seconde mort est bien réelle, mais Jésus veut nous en sauver.

[Conclusion]

Pour conclure, nous pouvons nous laisser interpeller par les chrétiens de Smyrne qui ont accordé plus d’importance à leur fidélité à Dieu qu’à tout le reste.

En tant que chrétiens dans un contexte de pays riche, on pourrait tomber dans la tentation de miser sur le prestige, la réputation et l’esthétique, comme les citoyens de Smyrne. À l’approche de Noël, on pourrait être tenté de se dire qu’il faut absolument en mettre plein la vue au public.

Si notre motivation c’est notre propre fierté, faisons attention et remettons Dieu en premier.

Si notre motivation c’est le témoignage, alors que Dieu nous inspire et nous donne sa sagesse.

Dans tous les cas, ce que Jésus attend de nous, ce n’est pas avant tout d’avoir un prestige particulier. Il attend de nous un témoignage dans la fidélité aux Écritures, dans la simplicité et la persévérance.

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